lune
2018
107(H) x 107(W) x 25(D) cm
hammered copper sheet. brass sheet,
patina
Sa démarche artistique se nourrit du caractère éphémère de la vie, du questionnement sur l’au-delà et de la notion d’enfermement. Enfermement dans une société de l’immédiateté qui prône l’éternelle jeunesse, repoussant la mort et s’écartant de toute transcendance. Ryo invoque le caractère transitoire de la vie par la beauté éphémère de ses sujets et a choisi comme symbole de ce passage de l’homme sur Terre la peau. Frontière entre le monde extérieur et soi, la peau est un marqueur, un témoin du temps qui passe et qui, en fonction de chacun, prend une expression différente. Véritable performance technique, cette peau de cuivre, d’une finesse remarquable d’1mm d’épaisseur, est sculptée tel un voyage dans le temps et à l’intérieur de soi. Comparable à une méditation, l’artiste y exprime son univers, la peau devenant le medium d’une véritable introspection. Très sensible à la patine des sculptures en marbre au cours des siècles, autre marqueur temporel, Ryo est passionné par la recherche de patines rares allant jusqu’à obtenir une patine blanche pour les visages et bleue pour les fonds. La transparence de ces patines laisse percevoir tous les détails de la peau, gravés et ciselés, témoins de cette introspection. Les traces de martelage et de ciselage, se substituant aux effleurements du pinceau avec la même finesse que ce dernier, font jaillirent les parties figuratives d’un univers abstrait, nous rappelant que l’homme fait parti d’un tout.
Ryo, à travers ses œuvres, nous renvoie à notre condition. Qui sommes-nous ? Nous sommes entrés dans une époque d’utopie posthumaniste où l’on n’a de cesse de repousser nos limites par la génétique et l’informatique : « living longer, healthier, smarter and happier ». Sommes-nous des entités singulières ? Ou bien voulons-nous d’une éthique à la troisième personne, celle d’une justice pour tous ? Ferons-nous le choix d’une utopie défendant un cosmopolitisme sans frontière ?
Conscient des limites naturelles nous séparant des dieux et nous inscrivant dans le cycle de la nature, symbolisé par le cercle qui entoure ses sculptures, tel le cycle de la Lune, Ryo dénonce la perte de nos repères et rêve de réconcilier l’humanité avec elle-même en proposant un voyage lumineux en quête d’éternité.
Cette sculpture est née du désir de pouvoir associer un travail instinctif, viscéral, un " lâcher-prise" à celui très maîtrisé de la ciselure, dans laquelle il a recherché au contraire la plus grande précision.
La partie basse de cette oeuvre correspond donc à un travail impulsif et brut du métal. Pour ce faire, il a fondu le métal au chalumeau jusqu'à donner naissance à des incisions, sorte de béances symbolisant le chaos. Puis, de ce chaos émerge une beauté éphémère. Ryo est japonais et très imprégné de culture bouddhique. Il a conçu cette sculpture en me référant au shogyo mujo, c'est à dire à l'impermanence. Cette notion de flux, de cycle sans fin lui a renvoyé au cycle de la lune et donc à la déesse Artémis, symbole de pureté, mère universelle, mais aussi guide des voyageurs.
C'est en ce sens que il invite le spectateur à un voyage au coeur de cette sculpture, afin que du chaos et de l'enfermement puisse naître en chacun d'eux une sérénité procurée par la beauté de ce visage.